Afterplay
Jos de Mul. Afterplay. In: V. Frissen, M. de Lange, J. de Mul, S. Lammes & J. Raessens (eds.) Playful identities. The Ludification of Digital Media Cultures. Amsterdam: Amsterdam University Press/ Chicago University Press, 2015, 337-45.
L’identité de base de données. Identité personnelle et culturelle à l’ère de la mise en données du monde
Jos de Mul. L’identité de base de données. Identité personnelle et culturelle à l’ère de la mise en données du monde. In Severo Marta & Romele Alberto (eds.) Traces numériques et territoires. Paris: Presses des Mines/ParisTech, 2015, 87-108.
Introduction [1]
Le 27 février 2004, j’ai pris part au débat plutôt passionné qui agitait les Pays-Bas sur le multiculturalisme en publiant un essai dans le NRC Handelsblad, un des grands quotidiens néerlandais [2]. Cet article commençait par la brève description d’une jeune Arabe qui, quelques mois auparavant, passait près de moi glissant sur des rollers dans la station de métro Kralingse Zoom à Rotterdam. Elle semblait être étudiante et se rendre, tout comme moi, à l’Université Érasme. Vêtue d’un sarouel bouffant et d’un t-shirt arborant un smiley, et portant un petit sac à dos, sa tête était couverte d’un foulard d’où dépassait le cordon de l’oreillette de son téléphone portable. Lorsqu’elle fut assez proche de moi, je pus capter quelques bribes de la conversation qu’elle menait, dans cet étrange mélange d’arabe et de néerlandais mâtiné d’un fort accent de Rotterdam, avec une amie, pour autant que je puisse le deviner au ton de la discussion. Pareille image d’une jeune musulmane patinant sur des rollers était assez inattendue en 2004. Pourtant, à en croire un des articles parus récemment sur le site Web de la communauté turque aux Pays-Bas, la pratique du roller connaît un succès grandissant chez les jeunes filles musulmanes néerlandaises [3]. De plus, cette pratique tendrait à gagner en popularité dans des cercles musulmans plus orthodoxes. En avril 2012, les amateurs de patinage artistique en Italie ont eu la faveur de voir Zahra Lari être la première patineuse venue du Golfe à évoluer en niqab.
La raison pour laquelle je commençais mon essai de 2004 par cette image pittoresque d’une jeune musulmane en rollers tenait à ce qu’elle était la proclamation vivante d’une identité personnelle et culturelle dans une société postmoderne. Elle se situait manifestement au-delà de l’opposition qui avait paralysé le débat néerlandais sur le multiculturalisme pendant de nombreuses années, à savoir : l’opposition entre le fait de conserver sa propre identité et celui de s’adapter à la culture néerlandaise. Dans le présent chapitre, je souhaite examiner plus avant l’identité postmoderne à l’aune de deux perspectives tendant à s’entremêler de plus en plus fortement : la globalisation et la mise en données (datafication). Je vais défendre la thèse que notre jeune musulmane de Rotterdam à rollers avec son téléphone portable incarne à la perfection ce type d’identité qui est élaborée par cette mise en données globale, caractéristique de la société postmoderne.
Ce chapitre se décompose en quatre parties. Premièrement, je vais traiter les notions d’identité personnelle et d’identité culturelle, en mettant en relief le rôle crucial des récits narratifs et des traditions. Avec ce contexte en vue, je procéderai à une critique de l’opposition stérile entre multiculturalisme et monoculturalisme, pour défendre au lieu de cela une position interculturaliste. Puis, je distinguerai entre les différents modes par lesquels les traditions sont constitutives respectivement des identités prémodernes, modernes et postmodernes. Dans la dernière partie, je porterai mon attention sur le rôle que joue la mise en données dans la construction d’une identité postmoderne. Je défendrai la thèse que les bases de données, telles que nous les trouvons installées dans les médias sociaux grand public comme Facebook, transforment de plus en plus l’identité narrative des personnes et cultures des âges prémodernes et modernes en ce que l’on pourrait appeler une identité de base de données (database identity). Dans les identités de bases de données, nous trouvons d’un côté certains aspects d’identités narratives radicalisées et, à l’inverse, d’autres aspects qui semblent être transformés en une forme culturelle purement et simplement différente. En lien avec le débat récent sur les big data, et en prenant Facebook comme exemple central, mes réflexions porteront sur certains des avantages et inconvénients de la mise en données et de la corrélationalisation de notre identité.
Database Identity: Personal and Cultural Identity in the Age of Global Datafication
Jos de Mul, Database Identity: Personal and Cultural Identity in the Age of Global Datafication. in: Wouter de Been, Payal Aurora and Mireille Hildebrandt (Eds.), Crossroads in New Media, Identity and Law. The Shape of Diversity to Come. Personal and Cultural Identity in the Age of Global Datafication. Basingstoke/New York: Palgrave Macmillan, 2015, 97-118.
This volume brings together a number of timely contributions at the nexus of new media, politics and law. The central intuition that ties these essays together is that information and communication technology, cultural identity, and legal and political institutions are spheres that co-evolve and interpenetrate in myriad ways. Discussing these shifting relationships, the contributions all probe the question of what shape diversity will take as a result of the changes in the way we communicate and spread information: that is, are we heading to the disintegration and fragmentation of national and cultural identity, or is society moving towards more consolidation, standardization and centralization at a transnational level? In an age of digitization and globalization, this book addresses the question of whether this calls for a new civility fit for the 21st century.
Jos de Mul, to begin with, takes the issue of identity head-on in his contribution. He argues that new networked communication technologies are leading to a datafication of identity. New ICTs are transforming traditional ‘narrative identity’ into a more plastic form of ‘database identity.’ Identity as the product of a linear development, as an outgrowth of a particular personal or group history – the bread and butter of the imagined community – is on the wane. Increasingly identity is broken up into machine-readable elements and stored in digital memory banks. This allows for an endless combination and re-combination of features. By itself this process does not necessarily result in a world of freedom and play, however. Although database identities allow for an extraordinary range of choice and are well suited to the freedom and flexibility of postmodern culture, there is a great deal of uniformity in the forms that database identities actually take. Hence, De Mul also addresses the standardization of identity in the prefabricated formats of social media, underlining the new entrapments of the digital age.
Het verhalende zelf. Over persoonlijke en narratieve identiteit
Jos de Mul. Het verhalende zelf. Over persoonlijke en narratieve identiteit. In M. Verkerk (red.), Filosofie, ethiek en praktijk. Liber amicorum voor Koo van der Wal, Rotterdam: Rotterdamse Filosofische Studies, 2000, 201-215.
1 Introductie
Het verhaal heeft de afgelopen decennia een opvallende opmars gemaakt in de mens- en cultuurwetenschappen. Niet alleen de wetenschappen die zich traditioneel bezig houden met de bestudering van verhalen, zoals de literatuur- en filmwetenschap, of waarin het vertellen van verhalen een belangrijke plaats inneemt, zoals de geschiedeniswetenschap, maar ook disciplines als de culturele antropologie, de theologie, de psychologie, de rechtswetenschap en de economie hebben de aandacht gericht op de belangrijke rol die verhalen spelen in het leven van de mens en in zijn culturele scheppingen zoals de kunst, de religie en de wetenschap.[1] “To raise the question of the nature of narrative”, zo vat Hayden White het belang van het verhaal voor de genoemde wetenschappen samen, “is to invite reflection on the very nature of culture and, possibly, even on the nature of humanity itself”.[2] De narratieve wending in de mens- en cultuurwetenschappen is ook niet voorbijgegaan aan de filosofie. Zowel in de analytische als in de continentale tradities is het verhaal een prominent onderwerp van reflectie geworden. In de wijsgerige antropologie en de ‘philosophy of mind’ heeft dit bij auteurs als Ricoeur, MacIntyre en Dennett geleid tot de ontwikkeling van narratieve opvattingen van de persoonlijke identiteit. Volgens de narratieve identiteitstheorie is het verhaal niet alleen een vruchtbare metafoor om de persoonlijke identiteit te beschrijven, maar construeren mensen hun identiteit daadwerkelijk met behulp van (levens)verhalen.
In dit artikel zal ik Ricoeurs model van narratieve identiteit, zoals dat in het laatste deel van zijn trilogie Temps et récit (1985) en in Soi-même comme un autre (1990) is ontwikkeld, situeren in de geschiedenis van het debat over de persoonlijke identiteit dat sinds Descartes de filosofische gemoederen in beweging heeft gehouden. Mijn betoog vangt aan met een analyse van de verschillende connotaties van het begrip (persoonlijke) identiteit, en van de antinomie die de reflectie op de persoonlijke identiteit in de moderne wijsbegeerte kenmerkt (§2). Vervolgens bespreek ik Ricoeurs aan Heidegger ontleende oplossing van deze antinomie (§3) en het narratieve identiteitsmodel dat hij in samenhang daarmee heeft ontwikkeld (§4). In de laatste paragraaf ga ik nader in op enkele implicaties van dit model voor de notie van de persoonlijke identiteit, waarbij ik tevens enkele overeenkomsten en verschillen zal aanstippen tussen Ricoers model van narratieve identiteit en de narratieve interpretatie van de persoonlijke identiteit van MacIntyre en Dennett.